Lors de mon premier contact avec l’Afrique de l’ouest, c’est avant tout la nature qui m’est apparue redoutable : tant le soleil que les pluies peuvent vous clouer à l’abri. Puis ces paysages variés, et ces végétaux qui se sont adaptés au climat désertique ou tropical, comme l’a fait l’Homme. Dans le Sahel, sur un sol sec et rouge, des arbres aux écorces de toutes les couleurs, aux tons presque de pastel, envahissent les lieux ; dans le sud, sur la côte, le climat tropical maintient des forêts denses aux allures originelles.
La terre se fond aux habitations, la terre fait les habitations, elle est les habitations, des abris simples, qui semblent n’avoir jamais changé depuis la nuit des temps. Et cette terre, toujours rouge, toujours présente, si proche de la peau de l’Homme, cette terre qui révèle les anachronismes face aux constructions de béton aussi redoutables que le climat. Cet urbanisme, tel un artefact de la brousse, où domine çà et là un immeuble, comme surgit un baobab au milieu des arbres bas entremêlés. Les villes sont basses et denses, comme livrées au hasard des espaces à conquérir, comme dans la jungle. Les villes, les grandes villes, sont pour moi une sorte de déplacement de la brousse : belles et violentes en même temps, et à la fois indomptables.
Je souhaite travailler sur les limites du vrai et du faux, le présent et le passé, puisqu’ils vivent ensemble en Afrique. En effet, l’on peut aujourd’hui aisément observer une scène qui aurait pu se dérouler il y a plusieurs siècles et tout d’un coup, un des personnages de la scène brandit un mobile high-tech et se met à parler tout seul. Je ressens pour le moment un besoin d’observer ce pays sur deux axes que je décris aujourd’hui de manière succincte.
Le premier projet est un travail d’observation solitaire, celui d’un photographe face à ce monde-là. Le second projet consisterait à valoriser les traditions culturelles en les transposant dans l’univers de la création d’installations de type land art. Ces réalisations éphémères devraient naître grâce à la participation de partenaires locaux, artistes et artisans (ou artisans et artistes) et je propose d’archiver ces temps d’échanges en images fixes et vidéo.
Projet 1
J’aimerais pouvoir travailler en image photographique argentique et juxtaposer en face à face deux photographies : une image inaltérée de ces villages oubliés, de brousse, de végétaux, de constructions, de rites traditionnels, et une de ces mégalopoles, fortes et violentes, avec leurs hordes de populations de tous horizons, villes où tout se vend pour survivre dans des tournures où tous les styles se confondent.
Je souhaiterais travailler avec la chambre photographique grand format, car j’ai pu observer au cours de mon voyage, qu’elle s’installe toujours sans problème tant en ville qu’au village. De plus elle permet de réaliser des photographies de grande qualité d’archive.
Projet 2
Toujours selon le même principe technique et la même démarche artistique, qui consiste à rendre compte des contrastes brousse/ville, j’aimerais montrer l’artisanat local, par exemple la fabrication du charbon de bois, des bottes de chaume ou des briques de terre, et suivre leurs pérégrinations le long des pistes et des routes, de la brousse à la ville, témoigner de la manière dont tout s’étale au gré des parcours pour être vendu, troqué et revendu plus loin par un camionneur.
Je souhaiterais créer avec ces artisans des installations de type land art dans les multiples friches urbaines des capitales de cette région du monde.