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Deux images en diptyque dans le conscient ou l’inconscient de l’habitant, des angles de prises de vues choisies dans ce que compose notre cadre de vie public et privé.

Ce travail tend à représenter les relations de vie quotidienne entre le quartier, l’espace naturel végétal ou industriel et l’espace privé de l’habitation dans les limites de la réalité subjective de la photographie.

Polysémie d’une cité

S’inscrivant dans la problématique du déterminisme urbanistique, cet article montrera que l’habitant de la cité est stigmatisé au travers de choix sémantiques qui agissent aussi sur les représentations symboliques. Il est le fruit d’un travail de groupe avec les étudiants de Médiation culturelle et communication de l’ICT.

Tout était déjà là, dans les esprits, sur les plans, avant même que ne pousse cette architecture « carcérale ». Il était évident que la somme des événements jusqu’alors cumulés, prévisibles et inattendus, calculés parfois, génèrerait de tels contresens dans l’écologie humaine.

L’étymologie nous rappelle que le mot « cité » signifie « ville ». Pour Aristote, la cité constitue la condition essentielle garantissant une vie pleinement humaine à ses membres, enclins à un idéal harmonieux fondé sur la justice et la vertu. Qu’en est-il aujourd’hui de cette « cité » devenue synonyme de crise sociale, d’erreur urbanistique ? Une désillusion, une mutation du sens et du symbole de cet idéal aristotélicien fédérateur. Car la cité jouait son rôle médiateur qui consistait à promouvoir la connaissance, la compréhension. Maintenant, dans bien des cas, il s’agit d’une médiation-conflit.

Les cités antiques sont devenues les « grands ensembles », éloignés maintenant de la ville « administrative », qui s’est vite fait un devoir de perdre sa capacité à rassembler des publics hétéroclites. D’ailleurs, ces grands ensembles symbolisent l’explosion capitaliste que l’on retrouve derrière la formule des manifestants de Mai 68 : « La bourgeoisie ne loge pas les travailleurs, elle les stocke ». Et soudain l’espace se réduit, se partage par la force des choses. On devient locataire de son non-espace, co-occupant passif et forcément destructeur des espaces collectifs !!!

A cet instant, un nouveau seuil est franchi : nous pénétrons la « banlieue », ce miroir où se reflètent les maladies de notre société, celles-là mêmes dont la ville s’était immunisée, un temps. Et lorsque la ville devient le symbole de ce qui n’est plus dans la cité, les « quartiers », où l’on ne flane pas comme en ville, mais où l’on traîne, se mobilisent. Pas toujours de façon heureuse certes, mais parfois avec un réel potentiel et l’intelligence d’exporter une « culture de banlieue » hors de la marginalité.

On comprend bien que la priorité n’est plus de réhabiliter des quartiers, mais toutes les consciences. On a trop longtemps privilégié le gigantisme, symbole d’anonymat, le comble pour des populations laissées pour anonymes, au détriment de toutes les règles de l’écologie humaine et des équilibres indispensables pour vivre ensemble. Et pour aller dans ce sens, il fallait la participation des populations au Grand Projet de Ville, car en donnant la parole, symbole de raison, on sort de la règle et de l’interdiction. On entre dans la loi et d’une certaine manière dans les privilèges de la démocratie, et plus particulièrement dans la citoynneté et implicitement on touche aux devoirs qui lui sont associés.

Stéphane Lapoutge